mardi 16 mai 2017

L'appel des jeunes grimpeurs et alpinistes

Le développement du matériel et des techniques d’escalade et d’alpinisme nous offre aujourd’hui un éventail très riche de pratiques : en salle, en couenne, en falaise, en montagne ; sur du rocher, en mixte, en dry, en cascade de glace ; sur protections à demeure ou amovibles. Mais nos terrains de jeu ne sont pas traités comme un bien commun. Ils sont étouffés par le poids culturel de la période du « tout spit », qui ne tient pas compte de la réalité et de la pluralité de nos pratiques. De nombreux conflits d'équipement surgissent. C’est désormais à nous, jeunes grimpeurs et alpinistes, de définir collectivement une vision moderne de nos pratiques et de construire les outils d’une large concertation permettant une gestion collective de l'espace commun de nos pratiques. 

Lire la suite de l'appel...

Création d'une association : RDV le 31 Mai à Grenoble

L’appel des jeunes a été lancé en début d’année, aujourd’hui on est plus d’une centaine de tous les horizons à s’être associé à ce texte et aux valeurs qu’il défend, il est temps d’aller dans le concret !
Escalade trad à Annot (photo par C. Vasseur)

L’objectif du texte étant de préparer un rassemblement et qu’on commence à s’organiser, on propose une première rencontre à Grenoble le Mercredi 31 Mai dans la soirée, autour d’une bière.
L’objectif est de créer une association loi 1901 autour de l’appel des jeunes, qui sera chargée d’organiser le rassemblement, et qui servira de support pour agir localement dans la gestion des espaces de pratique.

Rien de lourd, on a juste besoin de personnes motivées pour s’investir, il y a de nombreuses choses à faire : organiser le rassemblement, gérer la communication (il y a encore beaucoup de clubs et d’institutions à contacter), réfléchir à la suite à donner, rendre le blog plus convivial, …

Si vous souhaitez vous investir ne soyez pas timide, on a besoin de tout le monde peu importe votre expérience sur le rocher ou associative !

Pour ceux qui utilisent facebook, l’événement est là.
Pensez à "liker" la page pour avoir facilement les infos publiées dessus.

Pour les autres des précisions sur l'organisation seront fournies ici.
Comme il n'existe pas (encore) de "newsletter" sur cette page, vous pouvez envoyer un mail et vous serez tenu au courant des infos importantes par mail.

mercredi 5 avril 2017

L'appel des jeunes soutenu par Doug Scott à l'UIAA !

L'appel des jeunes sera évoqué par Doug Scott lors de la prochaine réunion UIAA (Union Internationale des Associations d'Alpinisme), c'est un honneur de voir que le message porte et particulièrement par la voix d'un alpiniste de sa trempe !
 
Voilà son message à notre attention :

" Du 21 au 23 avril prochain, le comité pour l’alpinisme de l’UIAA tiendra sa réunion annuelle, cette année à Keswick, à 20 minutes de chez moi. C’est Phil Wickens qui en est l’organisateur et c’est Phil qui a été à l’origine du document que nous avons rédigé sur « La préservation du rocher pour l’escalade traditionnelle ».
L’espace de parois rocheuses non équipées continue à diminuer sur le continent européen et pratiquement partout ailleurs. En conséquence, nous encourageons tous les représentants à cette réunion à donner plus de visibilité à notre document. Nous présenterons [l’appel des jeunes et la déclaration de l’appel des Jeunes envoyée à Mountain Wilderness] pour leur montrer que la préservation des terrains d’aventure pour l’escalade n’est pas une cause perdue.
C’est merveilleux de savoir que de jeunes grimpeurs et alpinistes français sont en train d’inverser les tendances mécanistiques récentes. Armand Charlet serait très fier d’eux comme tous les membres fondateurs du Groupe des Rochassiers [le nom du club des premiers Bleausards créé en 1907]."

Maintenant il va falloir qu'on organise notre rassemblement et toute les bonnes volontés sont bienvenues pour que ça puisse avoir lieu ! Je reviens à la charge bientôt...

Rob

mardi 21 février 2017

Point de vue : V. Meirieu, "Et si le rééquipement passait par le dééquipement ?"

Un texte proposé par Vincent Meirieu, équipeur prolifique du Vercors, qui nous invite à repenser la gestion de nos territoires de pratique : ça tombe bien :)
Escalade au pilier Leprince-Ringuet à Glandasse, une belle classique du Diois

 
"Le terrain d'aventure",  terme générique dont les définitions foisonnent....
La FFME entend par "terrain d'aventure", les sites et itinéraires de pratique qui ne répondent pas aux normes fédérales d'équipement des "sites sportifs", à savoir les sites conventionnés, entretenus, brochés et (ou) gougeonnés au diamètre de 12 dans leur totalité.  Dans ces conditions, le nombre de sites sportifs est bien évidemment largement inférieur au nombre de sites de terrain d'aventure même si le classement fédéral actuel fait état du contraire... Ou comment la fédération  n'a pas les moyens de ses ambitions.... Mais là n'est pas le propos.
Nous adopterons pour les besoins de cet article une définition plus proche de la pratique et de l'usage commun : nous entendons par "terrain d'aventure" les itinéraires de pratique de l'escalade dont l'absence de points d'assurage et (ou) la vétusté de l’équipement en place  imposent la pose de points amovibles de protection pour assurer sa sécurité. À l’‘inverse, nous qualifierons "d'escalade sportive" (même si le terme est assez galvaudé, comme si la pose de coinceurs ne nécessitait aucune condition physique...), la pratique de l'escalade sur tous les sites équipés (aux normes ou non), qui ne nécessitent pas le recours à des protections amovibles pour assurer sa sécurité.

Cela étant fait, interrogeons nous ensuite sur la pratique du terrain d'aventure en France aujourd’hui. Difficile de faire état d'un nombre de pratiquants avec exactitude... Mais force est de constater que de nombreux indicateurs témoignent d'un engouement, d'un intérêt bien  réel, de nombreux grimpeurs pour la pose des coinceurs.
Tout d'abord, les revues spécialisées d'escalade sportive se font l'écho depuis quelques temps des ascensions en libre d'itinéraires d'escalade artificielle exotiques, de l'ouverture de voies extrêmes sur friends et coinceurs à l'autre bout de la planète, de l'ascension  de voies dures équipées entièrement sur protections amovibles, etc... Je fais allusion vous l'aurez compris aux voies du Yosemite, aux itinéraires des frères Favresse et consorts, aux défis d'Arnaud Petit, aux « Black beans » et autres expériences verticales, aventureuses, et quelque peu élitistes me direz-vous... Le cinéma d'escalade fait lui aussi la promotion de ces pratiques de haut niveau bien éloignées des compétitions de vitesse.
Autre indicateur, les simples grimpeurs polymorphes que nous sommes semblent apprécier les destinations telles que la Jordanie qui, chaque hiver accueille bon nombre de petits français friands des fissures vierges de gré  rouge du Wadi Rum....  Les revues spécialisées encore une fois proposent régulièrement des articles sur ces destinations et d'autres moins éloignées dont l'escalade est pour le moins aventureuse.
Et puis la consultation des forums démontre que grand nombre d'itinéraires pour le moins célèbres et peu équipés sont régulièrement visités dans les calanques, à Presles ou au Verdon... En témoignent  les descriptions précises de ces voies autant que les questions qui s'y réfèrent.... Probablement que l'actuel Be d'escalade n'est pas étranger à cet engouement pour le terrain d'aventure et la répétition de ces itinéraires, car rappelons que ce diplôme impose la pratique du terrain d'aventure dans ses pré-requis  et dans sa formation elle même. Félicitons nous que cette formation professionnelle se soit donnée les moyens de donner des directions aux formes de pratique comme le maintien et le développement d'une escalade "traditionnelle" pour utiliser un terme à la mode. Gageons que les futurs diplômes de remplacement entretiennent aussi cette flamme et cette richesse de nos activités...
Enfin, il semblerait que la répétition de voies de terrain d'aventure identifiées ne soit plus la seule façon de pratiquer cette escalade et la recherche d'itinéraires nouveaux en France se fait sentir ardemment, car les voyages c'est onéreux, il faut bien le dire... En témoignent par exemple le développement de sites comme Annot qui proposent des couennes sans équipement à demeure. Et la colonisation des falaises par les gougeons comme le nombre limité de falaises sur le territoire (certes la France est bien pourvue en cailloux mais les terrains vierges d’équipement deviennent rares) suscitent des initiatives d’un genre nouveau telles que le déséquipement sauvage de la « Ulla » au Verdon en juin dernier, la réflexion menée à Presles au sujet du déséquipement de certains itinéraires, etc... Nous y voilà.... Au cœur du sujet....

L'idée que j'entends développer ici et qui gronde sur les falaises est la suivante : aux vues de la réalité d'une pratique effective et quantitative du terrain d'aventure, du peu d'itinéraires de qualité sans équipement (la rareté de ce type de voies en calcaire dans les massifs préalpins,  la politique de rééquipement menée ces dernières décennies et la limitation du nombre de falaises sur le territoire en sont les principales raisons), de la maturité des pratiques, de l'évolution du matériel de protection, du nombre considérable d'itinéraires de tous niveaux équipés,  ne serait-il pas temps de se poser la question du déséquipement de certains  itinéraires particulièrement beaux et propices à la pose de protections amovibles  ? Soyons bien clairs, la question est bien différente de celle du rééquipement qui animait les débats dans les années 90 au moment des plans départementaux de gestion des sites d'escalade ; Il ne s'agit plus de s'interroger sur la pertinence d'un rééquipement comme c'était le cas mais sur la pertinence d'un déséquipement, avec l'ambition de donner une troisième jeunesse à des voies dont l'intérêt en terrain d'aventure est évident.....
Nous sommes à l'ère d'une réflexion  de grande envergure sur la gestion des espaces de pratique devenus la cible des propriétaires, environnementalistes, assureurs, professionnels, usagers, institutionnels de tout poil, pour des raisons multiples qu'on commence à entrevoir et dont l'étude nous permettra de mieux comprendre la nature des conflits autant qu'elle favorisera le maintien des activités de pleine nature dans leur diversité et leur gratuité. A la faveur de ces grandes interrogations, ne serait-ce pas le moment de se poser de nouvelles questions telles que celle du déséquipement ?
Les organes locaux de gestion des sites de pratique, à savoir les comités fédéraux régionaux d'équipement, et les nombreuses Associations autonomes de gestion locale dont le travail est considérable, sont  certainement en droit de mener cette réflexion ; leur légitimité est acquise, leur fonctionnement démocratique, et les pratiquants et (ou) ouvreurs qui souhaitent y siéger peuvent le faire, doivent le faire, pour ne pas laisser les technocrates avec eux mêmes.  Les absents ont toujours tort ou comme dirait l'autre, "si tu ne t'occupes pas de politique, la politique s'occupe de toi..." Charge donc à ces organes locaux de se poser les bonnes questions et d'y répondre démocratiquement avant de procéder au déséquipement d'un itinéraire, questions telles que :
1/ l'itinéraire est-il particulièrement adapté techniquement  à la pose de coinceurs ?
2/ la qualité de son escalade et du rocher, son exemplarité et sa singularité, justifient il pleinement son déséquipement ?
3/ l'ouvreur est-il d'accord ? Sa légitimité en matière de devenir des itinéraires est évidente si l'on admet le principe de propriété intellectuelle en matière d'équipement...
4/ le terrain d'aventure fait-il défaut sur la falaise ? Car l'escalade ne tire t'elle pas sa richesse du principe de  la représentation sur les sites de toutes ses formes de pratique ?
5/ l'itinéraire est-il encore parcouru ? son déséquipement va-t-il  influer sur sa fréquentation et dans quel sens, et cela a t’il de l’importance ?
6/ le déséquipement de l'itinéraire nuira-t-il à la représentation de tous les niveaux sur le site ? Car il est vrai qu'on se doit de préserver des itinéraires équipés de niveau faciles et les fissures peuvent constituer souvent une partie de ces itinéraires....
7/ comment procède-t-on et avec quelle éthique ? J’ai personnellement admis le principe du désintérêt d'une voie "partiellement" équipée ... En terrain d'aventure, il me semble que seuls les relais doivent être équipés... Charge à chacun de se situer dans ce débat ...

Prenons un exemple : la non moins célébrissime « Ula », dans le Verdon.... Il ne s'agit pas de rendre légitime le déséquipement l'année dernière de cette voie car le caractère sauvage de l'acte perpétré et l'absence de réflexion collective en amont du projet jette à mon sens le discrédit sur lui.... En revanche, je suis bien convaincu de l'intérêt de cet itinéraire en l'absence d'équipement.... Une fissure de 250 m en calcaire dans un niveau 6b, sur un caillou exceptionnel d'une propreté impeccable ou on "jette" les coinceurs, cela est unique... Et puis combien y a-t-il d'itinéraires équipés de ce niveau dans les gorges du Verdon ? Une petite centaine ? « La demande », son corolaire un peu plus facile est équipée et devrait le rester....

J'entends bourdonner les détracteurs dont les arguments sont aussi nombreux que légitimes.... Pour exemple :
1/ "faire la promotion du terrain d'aventure, c'est faire la promotion d'une pratique élitiste....": À mon sens, être élitiste, c'est croire que certains grimpeurs de niveau modeste ne seront jamais capables de faire du terrain d'aventure et ne leur proposer que des itinéraires aseptisés (ou des fissures miteuses et buissonneuses, ce que sont souvent aujourd’hui les rares voies de terrain d’aventure accessibles préservées jusque là par le rééquipement)... Alors même que les élites dont on vante les qualités et célèbrent les exploits sur coinceurs, font, eux, du terrain d'aventure extrême sur du beau caillou... C'est sous-estimer les grimpeurs, mépriser leurs capacités.... Et puis pour citer Fara (une fois n'est pas coutume....), "le terrain d'aventure c'est vachement moins engagé que l'escalade sportive, tu mets autant de points que tu veux...". Mais encore faut-il que le terrain s'y prête... Dans les années 90, on estimait que la démocratisation de l'escalade devait passer par le rééquipement et l'aseptisation, on misait sur le tout sportif, découvrant les joies d'une escalade libre émancipée de l'alpinisme et de la lourdeur de son matériel de progression, profitant de l'essor du gougeon et estimant qu'il s'agissait là d'une évolution naturelle... Aujourd'hui, les pratiques se sont affinées, diversifiées, définies, et on sait qu'il existe une escalade de terrain d'aventure émancipée elle aussi de l'alpinisme, dont les adeptes sont nombreux.... Autres temps autres mœurs, ne pouvons-nous pas tenir compte des évolutions et de la diversité nécessaire des escalades, sans s'arquebouter sur des façons de faire conjoncturelles et peut être éculées ?
2/ il faut respecter le caractère historique des voies, pourquoi déséquiper certaines voies plus équipées encore à l’origine qu’elles ne le sont aujourd’hui ....": après rééquipement » : bon nombre de classiques des années soixante dix étaient à l'origine très équipées : l'escalade artificielle était de mise à l’approche du septième degré, et les outils de protection artificiels qu'étaient la plupart du temps les pitons  étaient souvent laissés à demeure. Pour certains, il conviendrait de tenir compte de cela et de laisser équiper (au rééquipement) ces itinéraires dans le respect de la philosophie ayant présidée à l'ouverture. Certaines falaises ont malheureusement pâti de cette conception du rééquipement  avec le rééquipement à l'identique de l'équipement d'origine. « Arcturus » à Presles est symptomatique de ce courant, à savoir une voie d'artif rééquipée à l'identique mais pour l'escalade libre.... Le grimpeur passe son temps à mousquetonner au milieu des pas et à s'éloigner latéralement des points pour trouver des prises.... Je crois que le rééquipement des voies doit tenir compte des pratiques actuelles et que partant de là, tout est possible avec l'accord de l'ouvreur : au besoin dévier l'itinéraire d'origine, et pourquoi pas le déséquiper.... Ce qui n'empêche pas de se faire l’écho des pratiques historiques et d'en respecter largement la teneur, à travers les témoignages que sont la topographie et toute la littérature qui peut enrober notre activité et constitue le principal vecteur de souvenir et de mémoire nécessaire.
- "le calcaire ne se prête pas la pose de coinceurs"... : c'est vrai que le fond des fissures calcaires est souvent terreux, les bords pas bien parallèles et la surface un peu péteuse.... Raison de plus pour laisser vierges les plus belles qui sont aussi les plus rares....
- " les fissures vierges sont pléthores alors pourquoi déséquiper les voies existantes..." : comme évoqué précédemment, nos terrains de jeu s'amenuisent, les falaises vierges se raréfient en France et les interdictions planent autant sur les Calanques, qu’à Presles et comme dans bien d’autres endroits… Il va falloir apprendre à vivre ensemble.

Voilà je crois matière à réflexion. Ces propos n'ont absolument pas vocation à opposer les pratiques et les pratiquants, je suis d'ailleurs friand moi même de fissures vierges comme de colonnettes gougeonnées. Tout ceci a pour seule et unique vocation de poser des questions, et de positionner nos activités dans le temps et l'espace avec l'espoir que puissent cohabiter des pratiques aussi variées que le terrain d'aventure et l'escalade sportive, bien convaincu que la frontière est suffisamment floue pour que ces deux pratiques subsistent et se nourrissent l'une de l'autre, dans la richesse de leur différence et l'évidence de leur similitude. L'escalade en site sportif naturel est et sera toujours une pratique à risque comme le terrain d'aventure est et sera toujours une activité sportive évidente. Rappelons nous aussi que l'escalade sportive est une singularité européenne alors même que la pose de protection amovible constitue la majeure partie de l'activité sur le plan mondial....
Le nombre de pratiquants de l'escalade ne cesse d'augmenter semble-t-il, la gestion des espaces de pratique devrait être encore une fois une priorité absolue....

Le déséquipement est peut-être une voie vers la coexistence de toutes les pratiques… Mais d’ailleurs, pourquoi pas aussi une stratégie de développement et du maintien de l’escalade sportive et pas seulement du terrain d’aventure ? Pourquoi ne pas envisager la possibilité de déséquiper complétement des sites sportifs désaffectés, passés de mode, au profit de l'équipement de nouveaux sites plus actuels.... À l'heure des interdictions et de Natura 2000, voilà qui pourrait pencher dans la balance et participer du soutien, du développement et de l'évolution permanente de l'escalade et de sa survie en milieu naturel....Mais c'est une autre histoire....
J’ai encore dit une connerie là ?

 Ce texte est paru initialement dans un "Grimper" de 2012 et il est reproduit avec l'accord de son auteur.

lundi 13 février 2017

Témoignage d'un Co-signataire : Vincent, pratiquant de l'escalade "sportive" équipée.

 "L'appel des jeunes " a parmi ses principaux objectifs de rassembler des pratiquants de tous horizons et avec des pratiques variées. C'est une réussite ! Si la mobilisation des pratiquants de l'alpinisme et du "terrain d'aventure" était attendue compte tenu des enjeux, nous sommes heureux de compter parmi nous une part significative de grimpeurs ne pratiquant que l'escalade sportive en salle ou en extérieur (ainsi que le parapente, la randonnée à pieds ou à skis, comme autres exemples) ! Ils sont déjà 14 signataires sur un total de 120.
"Opéra Vertaco", escalade sportive en Vercors.


 On publiera bientôt quelques stats intéressantes sur les signataires ainsi que sur ceux qui nous soutiennent : quel âge ils ont, d'où ils viennent, et quelles sont leurs pratiques.
En attendant pour se réjouir de cette première réussite, on publie le témoignage de Vincent G. qui nous explique pourquoi, grimpeur "sportif", il a signé cet appel à la cohabitation :


" Tout d'abord merci pour ton intérêt. Je ne pense pas avoir énormément à apporter à la discussion, c’est surtout le fait que la discussion ait lieu qui me semble impératif (d’où mon soutien à ce mouvement), et il me semble intéressant que des profils comme le mien soient représentés.


Déjà, il faut comprendre d’où vient ma culture de la grimpe : n’évoluant pas dans un milieu montagnard et ayant commencé sur le tard (20 ans), ma culture de l’escalade vient beaucoup des pays anglo-saxons, par le biais d’internet. Dans cette culture (et à grand renfort de belles images bien montées), l’accent est fait sur l’immense diversité des pratiques : le « hard trad » à l’anglaise, le « big wall » à la Yosemite, les forts bloqueurs à Beanie et Solutions (n’ayons pas peur des clichés), les grimpeurs de 9b sur calcaire espagnol,  etc…  De cette diversité, il ressort largement une notion d’éthique : respect du rocher, essayer au possible de respecter le style de la « first ascent », et application du principe de  « leave no trace », qui tend à diminuer le plus possible l’impact humain sur un milieu naturel. La notion d’éthique est vraiment CENTRALE dans cette culture. Le rocher n'est pas vu comme une matière modelable, mais presque comme une entité en soi, méritant d'être respectée.

 Pour moi donc, on ne DEVRAIT PAS, sauf circonstances exceptionnelles et après intense concertation entre les acteurs locaux, changer radicalement l’équipement d’une voie après l’ouverture, dans un souci d’éthique. De plus, si un secteur est bien adapté à une pratique propre, elle devrait être priorisée sur une pratique toute équipée. Il existe bien assez de falaises calcaires non protégeables à spitter…

 Corollaire au milieu dans lequel j’évolue : je suis la plupart du temps le plus expérimenté de mon groupe de grimpeurs, ce qui rend un peu difficile l’apprentissage de nouvelles formes de grimpe, telles que le trad, le mixte, le dry... Contrairement  à des montagnards pour qui l’étape suivante sera de chercher des itinéraires moins « aseptisé » au niveau de l’engagement, ma marge d’évolution en tant que grimpeur va plutôt se situer au niveau de ce que je peux travailler en salle : la forme physique et la technicité en libre. J’ai donc tendance à rechercher des itinéraires de plus en plus difficiles et ayant de plus en plus d’ampleur, mais conservant un équipement où la chute est généralement autorisée et l’équipement relativement solide.

 Conséquence : un grimpeur tel que moi va avoir tendance à délaisser les itinéraires "tout spit" un peu vétustes. Si on part du principe que le temps et les moyens des équipeurs sont limités (ce qui me paraît être une assomption raisonnable), trop équiper en spits sur des itinéraires à l’origine protégeables aurait peut-être pour conséquence de manger sur le terrain de jeu des pratiquants de trad, sans augmenter significativement mes possibilités d’escalade, étant donné que j’éviterai les courses non entretenues. Une perte sèche de possibilités donc, qui ne profite à personne. Bien sûr, j’apprécierai tout itinéraire spitté que l’on pourra me proposer, mais il faut à tout prix que cela ne se fasse pas au détriment d’autres types de pratique.

  Ceci dit, je tiens à nuancer le propos : j’ai personnellement rarement été confronté à ce genre de dérives, une poignée de fois peut-être (ce qui en soi est déjà un souci), mais j’entends trop souvent parler de ce genre d’incidents, ce qui montre que le niveau de concertation n’est pas ce qu’il devrait être, et j'aimerais éviter au maximum les conflits, qui peuvent parfois être synonyme de démotivation/désengagement des équipeurs, voire dans les cas extrêmes fermeture de certains sites.

 Un autre point que j’aimerais adresser car il me concerne directement : l’idée que, étant donné que le nombre de grimpeurs en salle et en falaise périurbaine explose, on devrait équiper en couenne et en grande voie à des standards rappelant la salle pour les attirer. Dans mon expérience, tout grimpeur de salle opérant une transition vers des itinéraires d'ampleur de moyenne et de haute montagne, va le faire pour le goût de l’aventure, pas pour enchaîner des croix sans se faire peur. Ils vont donc, après une période d’accoutumance, perdre un peu le goût des itinéraires « échelle de spits ». De plus (encore une fois dans mon expérience), à partir d’un certain niveau de pratique, quasiment tous les grimpeurs intéressés par la moyenne/haute montagne (même ceux ayant commencé en salle) vont vouloir essayer de poser des coinceurs dans leurs voies. Ils ne feront probablement pas tous des itinéraires en « full trad », mais ils se sensibiliseront clairement à l’escalade « propre », et auront tendance à l’encourager. Ceci est bien sûr basé sur mon vécu, je ne prétends pas avoir une expérience représentative…

 Voilà donc mon expérience de « grimpeur sur spit » désireux que sa pratique préserve au maximum l’environnement naturel et l’intégrité de tous les aspects de l’escalade... Et d'accord avec le fait que l'escalade évolue, et que les pratiques d'équipement devraient suivre. On représente une assez forte population de grimpeurs mine de rien, on n’est juste pas les plus vocaux, mais si concertation il y a, je pense qu'il sera toujours intéressant d’entendre notre avis ! Il existe bien sûr des enjeux dont je n'ai pas idée, mais ça représente je pense bien le point de vue d'un grimpeur "de base".

Vincent G.
"


vendredi 27 janvier 2017

Les moussaillons préparent la riposte !

Quand certains se demandent "à quoi bon signer", voilà pourquoi nous avons besoin de nous unir :

"Au Caf d'Aix, je fais partie depuis cet automne des encadrants d'un cycle de formation à l'autonomie en alpi, après l'avoir suivi il y a peu ... Pour nous, le terrain de jeu n'est pas bien loin, mais il est plus que jamais menacé, quelques équipeurs indélicats passent outre le comité de suivi de la charte d'escalade de la Sainte Victoire et commencent à perforer une à une les grandes classiques du TA à la Sainte (déjà au moins l'arête Genty, l'arête du grand couloir, les moussaillons...).
Je crois qu'il va y avoir besoin de jeunes pour défendre les falaises de la Sainte qui servent à la formation au TA de plein de Caf de toute la France : certains "anciens" cafistes (Jean-Paul Bouquier pour ne pas le nommer) se font d'ailleurs ouvertement traiter "d'Ayatollahs" et se sentent bien seuls pour défendre une charte obtenue il y a à peine 10 ans après de nombreuses concertations ...
"
Message transmis par Sylvain. 


Nous sommes actuellement en train d'écrire un dossier sur ce qui se passe à la Sainte pour expliquer le contexte et les enjeux, et exprimer nos points de vue.
Ensuite il faudra passer à l'action et redonner un second souffle à la Charte escalade, c'est pourquoi nous avons besoin de vous face à un équipeur qui prétend agir au nom de la "masse silencieuse des grimpeurs, qui n'est pas intéressée par le terrain d'aventure" !

Alors on pourra continuer à faire de belles initiations dans ces voies qui se prêtent particulièrement bien au terrain d'aventure, comme l'illustrent les photos suivantes...


Formation club dans les Moussaillons + arête SW
Formation club dans les Moussaillons + arête SW
Formation club dans les Moussaillons + arête SW
Formation club dans les trois pointes
Formation club dans les trois pointes

vendredi 20 janvier 2017

L'appel des jeunes grimpeurs et alpinistes

Le développement du matériel et des techniques d’escalade et d’alpinisme nous offre aujourd’hui un éventail très riche de pratiques : en salle, en couenne, en falaise, en montagne ; sur du rocher, en mixte, en dry, en cascade de glace ; sur protections à demeure ou amovibles. Mais nos terrains de jeu ne sont pas traités comme un bien commun. Ils sont étouffés par le poids culturel de la période du « tout spit », qui ne tient pas compte de la réalité et de la pluralité de nos pratiques. De nombreux conflits d'équipement surgissent. C’est désormais à nous, jeunes grimpeurs et alpinistes, de définir collectivement une vision moderne de nos pratiques et de construire les outils d’une large concertation permettant une gestion collective de l'espace commun de nos pratiques. 

Les évolutions récentes

L’état des lieux de nos pratiques montre que la moindre fréquentation de la haute-montagne au profit de la moyenne montagne et, encore plus, des zones urbaines ou péri-urbaines ne résulte pas, comme l’ont supposé certains de nos aînés, d’un manque de voies clefs en mains. Au contraire...

Le spit, apparu d’abord dans les falaises de basse altitude, puis dans les grandes voies et en haute montagne, a indéniablement contribué au développement de l’escalade et de l’alpinisme. En changeant le rapport à la chute en escalade sportive, il a permis une élévation du niveau technique qui profite aujourd’hui à toutes les formes de pratiques. En permettant de se protéger dans des zones de rocher compact, il a ouvert de nouveaux terrains de jeu. De superbes itinéraires ont été réalisés et les possibilités d’escalade ont été multipliées. Ainsi, l’ouverture par J.M. Cambon en 1984 de « L’épinard hallucinogène » en face Sud de la Meije a connu un grand succès. Tout comme celle, deux ans plus tard, de « Aurore Nucléaire » au Pic sans nom, renouvelant la fréquentation du secteur sauvage et délaissé du Glacier Noir.

Pourtant aujourd’hui l’attractivité de ces voies clefs en main en haute-montagne s’essouffle. Les données recueillies par le gardien du refuge du Promontoire sont à cet égard éclairantes. Ces dix dernières années, le nombre de nuitées du refuge a augmenté régulièrement. Près de 85% des réservations sont motivées par une course d’escalade ou d’alpinisme, dont seulement 6% concerne des voies équipées. Ainsi, contrairement à des idées préconçues, le nombre de cordées parcourant des itinéraires pas ou peu équipés est en croissance.

Si l’on quitte le cadre de la haute-montagne pour s’intéresser à la pratique de l’escalade dans le Verdon, on constate d’une part, l’émergence de voies clefs en main situées sur des parois satellites, telles que Félines, qui rencontrent un réel succès et d'autre part, l’évolution de la fréquentation dans une voie phare comme « ULA », qui a connu plusieurs strates d’équipement.

A son ouverture, la voie n’était équipée que de quelques pitons. Sa fréquentation régulière s’est accrue lorsque l’émergence des coinceurs a en partie réduit son engagement. Elle a ensuite été partiellement équipée avec des scellements aux relais et aux emplacements des pitons de l’ouverture, conservant ainsi son caractère. Sa fréquentation est restée importante. Au début des années 90, elle a été complètement équipée, ne nécessitant plus la pose de protections amovibles que pour des cordées au niveau trop juste. Il est intéressant de constater que la fréquentation de cette voie s’est alors essoufflée ! On peut penser que tant qu’à parcourir une voie sur spits, les grimpeurs ont préféré des voies plus récentes à la gestuelle moins « à l'ancienne ». Un fait marquant s’est produit en 2011. La voie a été déséquipée. N’ont été conservés que les scellements du premier équipement partiel. Cette initiative a provoqué nombre de réactions ; on y voyait un acte élitiste qui ne manquerait pas de faire chuter la fréquentation de la voie. Tout au contraire, la ULA a connu un net regain de fréquentation. Débarrassée de la concurrence avec les escalades clefs en mains cette voie a retrouvé l’attrait de la pratique dite « trad » sur protections amovibles.

Dans le cas des pratiques péri-urbaines, il ne s’agit pas pour nous de discuter des falaises équipées clefs en main qui sont nettement majoritaires en France et qui, par la nature du rocher, n’ont souvent pas lieu d’être équipées autrement que sur spits. Nous voudrions plutôt évoquer un lieu de pratique particulièrement révélateurs des tendances actuelles : Annot. Ce site concentre sur un rayon très réduit (30 mn en marchant) des voies de couenne sur spits, des voies de couenne « clean » sur protections amovibles et relais en place, et des blocs. Annot, fruit d’un fort investissement de quelques acteurs locaux en dehors des fédérations, est un exemple de cohabitation de nos pratiques plurielles. Il est aussi la preuve de l’intérêt contemporain pour une escalade sans spits. Il suffit d’un court séjour à l’automne ou au printemps pour constater l’attrait des fissures non équipées, où il est souvent nécessaire d’attendre son tour dans les plus jolies classiques. La fréquentation des voies sur spits d’Annot est bien plus faible, bien que ces voies soient très belles.

Nous finirons par le cas de la pratique hivernale en mixte et cascade de glace. Ces pratiques plutôt confidentielles à leurs débuts (en témoigne la quantité d’ouvertures réalisées par une poignée de précurseurs durant de nombreuses années) sont aujourd’hui très courues, et on assiste chaque début de saison au spectacle des cordées qui se bousculent dans les quelques itinéraires tôt en conditions. On assiste aussi à l’ouverture de nombreux itinéraires mixtes dans les massifs de proximité, signe d’une bonne vitalité de la pratique. 

Deux phénomènes marquants

Premièrement, ces exemples montrent que proposer des voies clefs en main en moyenne ou haute montagne comme l’ont fait nos ainés n'est pas nécessairement la bonne démarche pour augmenter la fréquentation des itinéraires. Non seulement cela n’apporte plus de nouveaux pratiquants mais l’équipement clefs en mains de voies déjà existantes en « trad » peut en faire chuter la fréquentation. Les exemples d'Annot et de la pratique hivernale montrent par ailleurs  que des itinéraires non équipés sont attractifs.

Deuxièmement, on constate que c'est en milieu urbain et péri-urbain, dans les salles d'escalade et en falaise, que l’augmentation de la fréquentation est la plus forte.


Les ressorts de ces évolutions

Plusieurs explications de ces évolutions peuvent être proposées

  • L’augmentation du nombre des pratiquants de l’escalade « sportive » en salles d’escalade et en couenne ne s’explique pas uniquement par l’aspect sécuritaire de l’escalade sur spits, sans quoi nous assisterions en même temps à une augmentation de la part des escalades équipées clefs en mains en haute-montagne. Il faut prendre en compte un autre facteur : l’escalade en milieu urbain ou péri-urbain fait disparaître les contraintes pratiques ou logistiques inhérentes à l’alpinisme et l’escalade en milieu alpin (météo, saisons, transport, temps nécessaire à la réalisation d’une course, investissement matériel etc.)
  • Si l’utilisation du spit a provoqué un renouvellement et une redistribution des pratiques en montagne, ce mouvement s’essouffle aujourd’hui. Il ne correspond plus à la pratique « moderne ». Ainsi à son ouverture « L’épinard hallucinogène » représentait un vrai challenge pour « l’alpiniste moyen » et une élévation du niveau technique des escalades à la Meije. Aujourd’hui, avec la progression du niveau d’escalade, ce type de voie ne répond plus à cette motivation. La création d’une offre abondante de voies (très) techniques et (très) esthétiques en milieu péri-urbain et moyenne montagne y répond mieux.
  • La progression du matériel (friends, ball-nuts, coinceurs, …) a permis l’émergence de voies de niveau technique supérieur peu ou pas équipées qui se parcourent sans exposition excessive. « Mitchka » (face Sud du grand Pic de la Meije) et les voies Piola du Mont-Blanc en sont le parfait exemple. Leur fréquentation importante témoigne de l’intérêt pour ce type d’itinéraires. On constate d’ailleurs une fréquentation soutenue des itinéraires classiques tels que la « Pierre-Allain » (Face Sud de la Meije), qui conserve depuis toutes ces années son aura. Ainsi il est intéressant de constater que l’usure qui touche les voies clefs en main d’altitude ne gagne pas les classiques peu équipées.

Cet état des lieux conduit à revoir la place du spit dans le développement des pratiques de l'alpinisme et de l'escalade. S’il est un vecteur de développement des pratiques en salle et falaises de proximités, il ne l’est plus pour les pratiques de moyenne et haute-montagne.

Les jeunes pratiquants de l'escalade et l'alpinisme

Pour comprendre l’évolution des pratiques, il faut aussi s’intéresser aux jeunes pratiquants de l’escalade et de l’alpinisme.
C'est un constat qu'on fait facilement en discutant avec les grimpeurs-alpinistes de passage par exemple au Refuge du Promontoire : ils sont aussi dans une immense majorité des pratiquants d’escalades « clefs en main » dans d'autres lieux comme à Presles, skieurs de randonnée, amateurs de cascade de glace, grimpeurs de salle. 
On constate la même chose en dehors de la haute-montagne avec des grimpeurs qui pratiquent autant en salle qu'en grande voie et en terrain d'aventure, par exemple à la Sainte-Victoire ou dans les Calanques. En somme, des gens avec une pratique plurielle.

Un autre constat que l’on peut dresser sur notre génération de jeunes grimpeurs et alpinistes, c’est celui d’une génération qui cherche à redonner un sens à l’aventure.
Ainsi nos ainés, après avoir conquis les sommets, puis s’être attaqués aux arêtes, aux piliers et aux faces, avant d’avoir ouvert les directes et les directissimes, et enfin transcrit ces évolutions dans les massifs de haute altitude, ont comme chaque génération décrété « la mort de l’aventure ». C’est oublier que l’alpinisme consiste justement à réinventer sans cesse l’aventure !

Aujourd’hui, par l’évolution du matériel, nous avons aussi la possibilité d’ouvrir ou de parcourir en libre de beaux itinéraires sur protections amovibles. La légèreté du matériel ouvre des possibilités d’enchainement qui n’ont de limite que le manque d’imagination ou le temps disponible.
Aujourd’hui nous, la jeune génération, nous réinventons l’aventure dans la proximité comme l’illustre le projet « Alpine line » de Y. Borgnet et Y. Joly.

L’urgence d’une concertation entre les pratiques

On assiste chaque année, sur les sites internet communautaires ou dans les magazines à des débats extrêmement polarisés entre les tenants du « tout spit » et ceux du « sans spit ». Ces débats ne font plus rien avancer aujourd'hui. L'enjeu n'est pas de « faire triompher » une forme d'escalade ou d'alpinisme au détriment d'une autre, mais bien au contraire de faire co-exister intelligemment des pratiques qui se complètent et s'enrichissent mutuellement.

Ainsi on peut regretter l'absence de concertation qui sévit ou a sévi dans des lieux tels que la Chartreuse, où l'escalade clefs en main sur spits à rongé le territoire des voies classiques partiellement équipées sur pitons, et en particulier les plus faciles d'entre-elles qui servaient à l'initiation.
On peut en revanche saluer des initiatives locales de concertation telles que la convention équipement du Parc National des Écrins, la charte escalade de la Sainte-Victoire ou encore la gestion du site d'Annot. Sur tous ces espaces, bien que des tensions existent, un mode de gestion concerté permet de conserver un équilibre entre les pratiques de chacun. Et préserver le bonheur de tous.
On peut aussi rappeler qu’en bien des endroits ailleurs qu’en France existe une concertation entre les pratiques : Grande Bretagne, Costa Blanca, Croatie, Gran Sasso, Dolomites, par exemple.
Le vallon des étançons est une illustration parfaite de cohabitation entre les pratiques et de la réussite de la convention escalade du parc national. Parti de la Bérarde, on trouve rapidement les sites d'escalade sportive en couenne. A peine plus haut, on pratique l'escalade dans des grandes voies clefs en main de proximité à la tête de la Maye et aux contreforts du Replat. On peut, à la journée ou depuis le refuge du Chatelleret, pratiquer une escalade peu équipée «de proximité » au pilier Candau (Gandolière) ou à la Tête Sud du Replat. On trouve une escalade plus sauvage et engagée en face S de la Meije (Allain, Chapoutot, Dibona, …), de l'alpinisme classique (Aigle, SSW des Cavales, Gény), mixte (Z en face N, Pavé) ou neigeux (SE et NE du Râteau).
S'il y a un vallon qui illustre positivement la pluralité des pratiques, c'est bien celui-ci.


Nous jeunes grimpeurs et alpinistes souhaitons mettre en place une concertation entre les pratiques afin de redonner à chacun un espace d’expression. En particulier il nous semble urgent :

  • De cesser la destruction des itinéraires d’escalade traditionnelle par leur équipement clefs en mains.
  • De rendre aux escalades peu ou pas équipées leur statut de terrains d’initiation et de progression, afin que les pratiquants ne se trouvent pas contraint de débuter directement dans des itinéraires difficiles ou d’accès compliqué.
  • De laisser des espaces vierges dans lesquels notre génération et celles à venir puisse s’exprimer.
Forts de ce constat nous sommes nombreux à souhaiter organiser la tenue d'un rassemblement dont les objectifs seront :
  • Faire des jeunes grimpeurs et alpinistes les moteurs de la promotion de la diversité des pratiques et de la concertation entre les pratiques 
  • Rassembler les pratiquants de tous horizons, quelle que soit leur pratique.
  • Réaffirmer l'alpinisme et l'escalade comme étant des pratiques plurielles avec une continuité de l'escalade en salles jusqu'aux grandes parois alpines.
  • Construire les outils d'une concertation, afin de préserver le terrain commun de nos pratiques d’escalade et d’alpinisme sous toutes leurs formes.

Ce rassemblement organisé à Grenoble sera l’occasion d’élargir ce premier texte en débattant des problématiques centrales de ce renouvellement des pratiques d’alpinisme et d’escalade :
  • Quelle est la place de l’engagement et du renoncement dans nos pratiques ?
  • Comment articuler les différentes composantes de ces pratiques plurielles afin de garantir un terrain de jeu géré comme un bien commun, en gardant une place pour chacun quel que soit son niveau et son mode de pratique ?
  • Faut-il changer notre façon d’équiper, afin de redonner un espace aux pratiques peu ou pas équipées, dans les falaises d’une ou plusieurs longueurs ? Une mixité des pratiques et des équipements au sein des sites d’escalade est-elle possible et souhaitable ?
  • Comment peut-on garantir aux futures générations des terrains dans lesquels elles pourront s’exprimer notamment par l’ouverture et le parcours d’itinéraires laissés sauvages (pas d’équipement et pas ou peu d’infos) ?

Ce rassemblement se conclura par l'écriture commune d'un manifeste, ayant pour objectif de faire la publicité la plus large possible de cette initiative et de soutenir la mise en place des outils de concertation.

Merci à celles et ceux qui, à travers de multiples discussions, ont participé à l'élaboration de cet appel.

Nous invitons chaleureusement toute personne concernée et motivée par cette initiative à signer ce texte et à nous rejoindre pour préparer le rassemblement de Grenoble.




Débutant ou cador, pratiquant acharné ou occasionnel, ton avis compte !
Toi aussi deviens co-signataire de cet appel !